octobre 02 2025

Impôt sur la fortune immobilière (IFI) : la preuve de l’objectif patrimonial fait échec à la non-déductibilité des dettes

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De manière inédite en matière d'IFI, le Tribunal judiciaire de Compiègne juge que la clause anti-abus (CGI, art. 973, II) applicable à la prise en compte des dettes dans l’évaluation des parts sociales, doit être appréciée en mettant en balance l’économie d’impôt effectivement réalisée avec les autres avantages, notamment patrimoniaux, poursuivis par l’opération. En conséquence, la seule constatation d’un avantage fiscal ne suffit pas à caractériser un « objectif principalement fiscal » ni à justifier l’exclusion de la déductibilité d’un compte courant d’associé pour la valorisation des parts d’une SCI (TJ de Compiègne, 2 septembre 2025, n° 24/00911).

Faits et procédure

En 2019, M. et Mme H. ont constitué une SCI familiale dans le but de réorganiser leur patrimoine immobilier et d’en préparer la transmission à leurs enfants, laquelle a finalement été réalisée par une donation-partage en juin 2022. Dans le cadre de cette stratégie patrimoniale, la SCI a acquis des immeubles appartenant à l'un des époux, financés pour partie par un emprunt bancaire et pour partie par des apports en compte courant d’associés effectués par eux. Les requérants ont alors évalué leurs parts sociales en tenant compte de ces dettes, ce qui a eu pour effet de réduire l’assiette de l’IFI dû au titre des années 2020 et 2021.

Par une proposition de rectification notifiée en mars 2022, l’administration a remis en cause la déductibilité des dettes ainsi générées, en invoquant la « clause anti-abus » de l’article 973, II du CGI. Elle a en effet considéré que ces dettes avaient été contractées dans un « objectif principalement fiscal », consistant à minorer artificiellement l'assiette de l’IFI et a dès lors réintégré les déductions opérées. Les époux ont saisi le Tribunal judiciaire de Compiègne afin d'obtenir la décharge des dégrèvements opérés, ainsi que des intérêts de retard afférents.

Décision du tribunal judiciaire de compiègne

Le Tribunal adopte une lecture pragmatique de la clause anti-abus, en rappelant que la notion d’« objectif principalement fiscal » visée à l’article 973, II du CGI se distingue de celle, plus stricte, de « but exclusivement fiscal » applicable en matière d’abus de droit (LPF, art. L. 64).

A cet égard, le Tribunal juge que pour apprécier la notion d’« objectif principalement fiscal », il convient de mettre en balance « l’économie de l’impôt résultant de la minoration de l’assiette imposable à l’IFI » et « les avantages autres que fiscaux résultant du montage ». Cette appréciation ne saurait être réduite à une approche strictement mathématique, compte tenu de la rédaction des textes applicables.

Au cas d'espèce, le Tribunal relève, d'une part, que l’opération s’inscrivait dans une stratégie globale et cohérente d’organisation patrimoniale visant la transmission du patrimoine immobilier et, d'autre part, que l’économie d’impôt générée était marginale. Il note par ailleurs que le décalage chronologique entre la constitution de la SCI (2019) et la donation- partage (2022) se justifiait par des circonstances de fait particulières (crise sanitaire liée à la Covid-19, état de santé de l’un des époux, fermeture temporaire de l’étude notariale en charge de l’opération, etc.).

En conséquence, le Tribunal juge que la simple constatation d’un avantage fiscal ne suffit pas, à elle seule, à écarter la déductibilité du compte courant d'associé pour le calcul de l’IFI.

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