junho 10 2021

Lutte contre la corruption : l’administration américaine annonce le renforcement de sa stratégie invoquant la sécurité nationale des États-Unis

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La coopération entre les différents régulateurs nationaux témoigne d’un mouvement global d’harmonisation des standards internationaux.

Cette tendance s’inscrit dans la continuité des objectifs définis dans le cadre du G20/B20 2020, lors duquel les auteurs de cet article ont eu l’honneur d’être nommés Knowledge Partner et d’avoir contribué aux travaux de la Taskforce on Integrity & Compliance.

Dans ce contexte, l’administration Biden a publié le 3 juin 2021 sur le site de la Maison Blanche un mémorandum établissant la lutte contre la corruption comme un intérêt fondamental de la sécurité nationale des États-Unis :

"En publiant ce mémorandum d'étude sur la sécurité nationale, j'établis que la lutte contre la corruption est un intérêt fondamental de la sécurité nationale des États-Unis. Mon administration dirigera les efforts visant à promouvoir la bonne gouvernance, à apporter la transparence aux États-Unis et aux systèmes financiers mondiaux, à prévenir et à combattre la corruption dans le pays et à l'étranger, et à faire en sorte qu'il soit de plus en plus difficile pour les acteurs corrompus de protéger leurs activités."1

Soulignant que la corruption porte atteinte à la confiance du public, à l’intégrité des marchés et fragilise les démocraties, le Président Biden rappelle que le montant des actes de corruption est estimé entre 2 et 5 % du produit intérieur brut mondial. Il déclare que la corruption, particulièrement transnationale, menace la sécurité des États-Unis.

La stratégie présidentielle vise notamment à renforcer la capacité du gouvernement des États-Unis à :

  • Moderniser, accroître, coordonner, fournir des ressources afin d’améliorer la capacité des principaux départements et agences ;
  • Combattre toutes les formes de financement illicite aux États-Unis et dans les systèmes financiers internationaux ;
  • Poursuivre les individus corrompus, les organisations criminelles transnationales et leurs facilitateurs ;
  • Renforcer la capacité des institutions nationales et internationales et des organismes multilatéraux à établir des normes mondiales de lutte contre la corruption ;
  • Renforcer la coopération internationale pour lutter contre la corruption stratégique des dirigeants étrangers, des entreprises d'État étrangères ou affiliées, d’autres acteurs étrangers incluant leurs collaborateurs locaux et des organisations criminelles transnationales ;
  • Accroître les ressources des États-Unis et de leurs partenaires notamment en matière d'enquête, d'aide financière, technique et politique aux pays étrangers qui manifestent la volonté de réduire la corruption ; et
  • Aider et renforcer la capacité des autorités et des institutions américaines à mettre en œuvre des mesures de transparence, de contrôle et de responsabilité.

Un examen inter-agences fédérales sera achevé dans les deux cents jours suivant la date du présent mémorandum et sera réalisé par des représentants de quinze différentes agences et bureaux, dont : le Département d’Etat (Department of State) ; le Département du Trésor (Department of the Treasury) ; le Département de la Justice (Department of Justice) ; l’Agence centrale de renseignement (Central Intelligence Agency) ; l’Agence nationale de sécurité (National Security Agency) ; le Département de la Défense (Department of Defense) ; le Département du Commerce (Department of Commerce) et autres.

Un rapport et des recommandations seront alors soumis au Président pour qu'il émette des directives et prenne des mesures supplémentaires.

Quels enseignements pour les entreprises étrangères ?

Au regard de ces déclarations, il ressort que la lutte contre la corruption devient l’une des priorités de l’administration Biden : allocation de ressources et renforcement des agences fédérales, croissance probable des poursuites, développement de la coopération internationale, etc. Dans un futur proche, nous pouvons potentiellement nous attendre à une codification accrue de certains principes en matière de lutte contre la corruption et de conformité, une mise à jour éventuelle du Foreign Corrupt Practices Act (FCPA) et des lignes directrices relatives à la conformité du DOJ, de la SEC ou autre autorité à destination des entreprises. Cette évolution s’accompagnera potentiellement d’une coopération croissante entre les régulateurs américains et étrangers, notamment français. En effet, la France semble aujourd’hui faire figure d’exemple en matière de lutte contre la corruption, en raison de l’existence d’une définition plus élargie de la corruption (active, passive, publique et privée) et des mesures préventives obligatoires de la loi Sapin II2.

Par ailleurs, une telle coopération entre les régulateurs américains et français, tels que le Parquet national financier (PNF) et l’Agence française anticorruption (AFA), est déjà bien ancrée, comme le démontrent notamment certaines affaires récentes. Reste à surveiller comment cette annonce affectera cette coopération et l’étendue de la compétence extraterritoriale des autorités américaines en France et en Europe.



1 Maison Blanche, “Memorandum on Establishing the Fight Against Corruption as a Core United States National Security Interest”, en date du 3 juin 2021, disponible via le lien suivant : https://www.whitehouse.gov/briefing-room/presidential-actions/2021/06/03/memorandum-on-establishing-the-fight-against-corruption-as-a-core-united-states-national-security-interest/

2 Loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, disponible via le lien suivant : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000033558528

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